lundi 11 janvier 2016

Presque chanson - Elle me regarde

Passant devant moi, elle s'arrête
Le visage clair sous son front blond
Et elle se tient sur mon perron
Pourtant, plus personne ne s'arrête

De ses yeux bleus elle me regarde,
D'un regard tendre et apaisant
Jeunette, il y a bien longtemps
Que plus personne ne me regarde

D'un croissant blanc elle me sourit,
Fendant son visage ingénu
Pourtant bon dieu, j'avais perdu
L'habitude qu'un ange me sourit

Et comme en guise de salut
Elle me tends sa main gantée
Ça me semble faire des années
Que je n'ai vu de main tendue

Toi, la fillette qui me regarde,
Depuis que je suis planté là
Tu es la première qui me voit,
Tu es la première qui s'attarde

De la lumière de ton enfance
Haute comme deux pommes ou comme trois,
Tu sembles avoir vu au delà,
C'est peut-être ça l'innocence

Alors de tes tout petits doigts
Dans l'ombre glacée de ma paume
Tu me déposes quelques ronds jaunes
Et t'en va rejoindre ton toit

Va t'en retrouver tes parents,
Je resterai sur mon pavé
À te regarder t'éloigner,
Déjà la nuit tombe doucement

Va t'en retrouver ton cocon
Ma douce enfant, mon chérubin
Ton regard j'en ai fait mon pain,
Ton sourire j'en fais ma maison

Caché sous une lumière blafarde
Je pense tout en fermant les yeux
À ceux qui m'ignorent, ou, au mieux,
De coups d’œil malveillants me lardent

Et si le monde était peuplé
De petits anges qui sourient,
À défaut d'être bien nourri
Au moins je serais regardé

Et si les grands avaient su faire
Un monde juste un peu moins pourri
J'aurais résisté à la nuit,
J'aurais survécu à l'hiver